La Nuit Bleue se déroule dans le cadre imposant et exceptionnel de la Saline royale d'Arc et Senan (exemple de cité idéale, par Nicolas Ledoux). Le festival a lieu pendant un nuit entière, de 21h jusqu'à 7h du matin, la seconde semaine de juillet.
(photo © Nicolas Waltefaugle)
On parle ici d'architecture sonore, la salle principale étant équipée de 90 haut-parleurs pour une surface totale de 1900m2, autrement nommé 'acousmonium'. Le principe est assez simple, quelques dizaines de morceaux écrits par des compositeurs sont mis en espace par trois interprètes à qui le lieu est abandonné.
Les visiteurs ont la liberté de s'allonger sur des matelas ou bien encore des transats, après quoi il suffit de fermer les yeux pour prendre un peu d'altitude en se laissant porter par les effluves sonores. Les plus aguerris apportent un sac de couchage ou une couverture, afin de faire face aux températures plus fraîches du petit matin.
Au delà des concerts spacialisés (une seconde salle, plus modeste, propose également ce type de mise en espace d'oeuvres musicales), les jardins entourant la Saline deviennent autant de lieux d'exposition pour des installations qui tournent toutes autour de l'expérience sonore.
On pourra noter cette année le travail de Pascal Rueff et Christophe Baratay, 'Chlorures', proposant un parcours accompagné d'un GPS, d'un casque audio et d'un mini baladeur. Le GPS indiquant votre position, déclenche les sons du baladeur audio. Ces enregistrements sont basés sur le principe de l'enregistrement binaural, qui permet la spatialisation du son lors de l'enregistrement. L'effet ne peut être restitué que par l'utilisation d'un casque steréo lors de l'écoute finale. Le Long du parcours, vous pouvez vous surprendre à vous retourner subitement, persuadé que vous êtes d'être suivi par quelqu'un marchant derrière vous dans le gravier blancs de la Saline. A 3h43 du matin, l'effet est garanti et l'on prend alors conscience que notre vision noie notre audition.
Au hasard de vos ballades, vous pouviez également voir l'installation 'Monster Happy Tapes' de Colin Ponthot présentant un nid imposant constitué d'un ensemble de bandes magnétiques de cassette audio, suspendu au plafond d'une petite desserte de la Saline. Des têtes de lecture de magnétophone sont mises à la disposition des visiteurs, vous donnant ainsi la possibilité de faire renaître les sons encore inscrit sur les bandes. L'ensemble (plusieurs personnes pouvant simultanément essayer de re-générer un son inscrit sur une partie de bande) génère des sons qui rappellent quelque peu les EVP (Electronic Voice Phenomenon), l'oeuvre s'intégrant dés lors exactement au lieu et au temps.
ColinPonthot_Monster.mp3 (1.90 Mo)
La nuit se déroule ainsi parfaitement, jusqu'à l'ultime oeuvre interprétée dans la salle principale, quelques minutes avant 7h. Malgré une fatigue naissante, on se surprend à apprécier jusqu'à ce dernier morceau qui cette année fut l'excellent Locomotion écrit par Plastikman.
Tout dans cette nuit vous insite à vous croire ailleurs que sur Terre, et ce en évitant l'usage d'un quelconque psychotrope. On quitte alors la Saline avec regret, accompagné d'une nette impression d'avoir vécu un expérience très particulière.